Réforme de retraites, grande démission, difficultés de recrutement…le travail est plus que jamais en question. Les conflits et tensions du moment ont le mérite de nous permettre collectivement d’appréhender la question du travail à travers plusieurs prismes. Pour les professionnels qui accompagnent les personnes en recherche de transition, le travail, son contenu, son sens, sa place, ses modalités est l’invité quotidien. Que faire ? Comment déployer sa vie professionnelle ? Quelles certitudes dans cet environnement imprévisible ? Le travail est donc interrogé. Même sa définition, et donc la polysémie du terme, sont l’objet de publications. Dans un ouvrage récent, la sociologue Marie-Anne Dujarier précise que le travail est à la fois une activité (un effort), un produit (une réalisation, un ouvrage) et un emploi (un statut rémunérateur). Elle constate que ces fonctions ne sont plus nécessairement alignées. La frénésie de publications sur le thème se retrouve dans la presse spécialisée.
Le mensuel Philosophie magazine publie un numéro sur ce thème « Est-ce qu’on travaille trop ? » dans lequel le philosophe Denis Maillard aborde la question du droit de retrait de la comédie inhumaine du travail et reprend le fil des réflexions liées aux impacts de la période Covid, notamment avec ce qu’il développe autour de la question du back-office de la société. « Plus une partie de la société se libère du travail pour mieux le consommer, plus elle peut choisir de vivre et de travailler quand, où et comme elle le désire ; alors plus ce mode de vie va faire peser sur les travailleurs du back-office une somme accrue de contraintes en termes de disponibilités, de transport et d’efforts. ».
Dans l’agitation du moment, on ressort des archives des penseurs précieux. J’avoue retrouver avec nostalgie des auteurs disparus des radars pendant plusieurs décennies : la convivialité vue par Ivan Illich, André Gorz et ses métamorphoses du travail. Et cela n’empêche pas de savourer l’essai plus récent mais plus que jamais d’actualité de David Graeber et ses bullshits Jobs.
Mais, au fond, pourquoi s’inquiéter finalement ? Dans une dépêche de l’AFP, le chercheur américain Ben Goertzel affirme : « Avec l’arrivée prochaine de nouveaux systèmes du même type que ChatGPT, je pense que 80 % des emplois occupés par des humains pourraient devenir obsolètes. Mais je ne vois pas ça comme une menace, mais comme un avantage, explique-t-il. C’est une bonne chose. Les gens vont trouver de meilleures choses à faire que travailler pour gagner leur vie. Pratiquement toutes les tâches administratives pourront être automatisées ». Bien, il pense que …mais au fond on ne sait pas vraiment ! Comme on le voit, les lectures diffèrent ! Et les inquiétudes, révoltes et controverses s’élargissent !
Psychologie du travail digitalisé
Alors le travail justement ! Marc-Éric Bobillier-Chaumon vient de publier un ouvrage important : Psychologie du travail digitalisé : nouvelles formes du travail et clinique des usages.
Il est présenté ainsi : Les nouvelles formes de travail (travail hybride et distanciel, algorithmisation de l’activité, flex-office…) et l’arrivée de technologies émergentes (IA, robot, technologies immersives et ubiquitaires…) bousculent aujourd’hui profondément notre rapport au travail, à nous-mêmes ainsi qu’aux autres. Ce n’est pas seulement le contenu et la nature du travail à faire qui se reconfigurent, c’est également la manière de faire ce travail qui se trouve remaniée. Les professionnels sont malheureusement trop peu associés à ces transformations qui les touchent pourtant au premier chef. Ils sont vus au mieux comme la simple variable d’ajustement d’un projet qui les dépasse, au pire comme les exécutants dociles d’une technologie qui devient le maître de ceux qu’elle était censée servir.
Marc-Éric Bobillier-Chaumon sera avec nous pour un WEBINAIRE KELVOA : Psychologie du travail digitalisé : nouvelles formes du travail et clinique des usages le lundi 15 mai 2023 de 16 H 30 à 18 H 30
Sortir du bureau et prendre des chemins de traverse ?
Et nous poursuivons aussi notre exploration des chemins de traverse !
Le travail encore ! La situation actuelle du marché du travail, son évolution rapide et la question de l’accès à l’emploi pour les publics dits « éloignés » de ce marché nous semblent un champ de travail propice pour explorer des chemins de traverse, des contre-allées.
Nous vous proposons un autre Webinaire KELVOA le lundi 12 juin 2023 de 16 H 30 à 18 H 30 : Accompagner autrement : Sortir du bureau et prendre des chemins de traverse ?
Nous y discuterons les initiatives d’insercall et de la Cité de l’emploi d’Avignon (insercall et Mission Locale Jeunes Grand Avignon) présentées par Gwenaël Bourboulon, directrice d’insercall et Flore Olivieri, référente Cité de l’emploi Avignon.
Et retrouvez l’article publié sur Epale concernant leurs initiatives.
Transitions et accompagnement des personnes en transition
Et pour finir, parlons transitions et accompagnement des personnes en transition !
Vous pouvez retrouver un article ICI publié sur la plateforme Epale.
Cet article et le thème de la rencontre KELVOA sont directement inspirés d’une contribution collective proposée en juillet 2022 au Groupe de travail « Transitions professionnelles » du Réseau Emploi Compétences de France Stratégie, le rapport étant attendu en début d’année 2023. Et cette contribution sera au cœur de la rencontre KELVOA « L’art d’accompagner autrement » justement sur le thème « Accompagner les personnes en transition professionnelle aujourd’hui » le mardi 27 juin à Paris.
Nous y consacrerons donc une journée entière pour nous aider à :
- Donner une perspective historique à ces questions d’accompagnement et repérer comment des conceptions dominantes se sont installées, à la base de nombreux dispositifs.
- Appréhender la situation des personnes en transitions professionnelles de différents points de vue.
- Repérer et discuter les impacts tant en termes de politique publique (conception de l’offre de service et des dispositifs) que de principes d’intervention et de gestes professionnels d’accompagnement.
Au plaisir d’échanger.
André Chauvet